Sabotage : «Sans coupables, la police en fabrique»
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Sabotage : «Sans coupables, la police en fabrique»
Sabotage : «Sans coupables, la police en fabrique»
Propos recueillis par Aziz Zemouri (Figaro Magazine)
13/11/2008
.
INTERVIEW - Sébastien Schifres est doctorant en science politique et militant du mouvement des «autonomes», classé à l'ultra-gauche, auquel sont soupçonnées d'appartenir les dix personnes gardées à vue en lien avec les sabotages de caténaires à la SNCF. Il dénonce des arrestations sans «aucun élément matériel».
Connaissez-vous certains des interpellés ?
Pour le moment, la seule personne dont l'identité a été rendu publique c'est Julien Coupat (ancien de l'École des hautes études en sciences sociales et fondateur de la revue Tiqqun, ndlr). C'est un ami à moi qui a souvent été à mes côtés dans le mouvement étudiant. Je suis scandalisé des accusations que la police ose porter contre lui. Aujourd'hui, un intellectuel est en garde à vue pour ses idées. Il n'y a aucun élément matériel pour appuyer la thèse de la police. Et évidemment, quand la police ne trouve pas de coupables, elle les fabrique. En Julien Coupat elle a donc trouvé un faux coupable sous prétexte qu'il a écrit dans une revue révolutionnaire. Michèle Alliot-Marie prétend défendre la démocratie, mais le capitalisme n'a jamais été un régime démocratique.
Vous faites partie du mouvement des «autonomes», qu'est-ce que c'est ?
Il y a aujourd'hui en France des gens qui pensent que Mai 68 ce n'est pas fini et que ce n'est pas en votant pour Olivier Besancenot que l'on fera la révolution. Le mouvement autonome est une tendance du mouvement libertaire qui est apparu en France à la fin des années 70. A la différence des anarcho-syndicalistes qui considèrent que la lutte contre le capitalisme doit s'organiser dans les syndicats, les autonomes préfèrent s'organiser dans des collectifs informels, sans existence légale.
Vous avez vous-même participé à des actions, notamment l'occupation de l'EHESS en 2006. La violence est-elle inhérente au mouvement?
Les autonomes ne sont pas nécessairement violents. Généralement, la violence vient plutôt de la police comme on l'a vu à Gênes avec la mort de Carlo Giuliani, ce manifestant tué par balle par la police italienne. La plupart des actions des autonomes sont aujourd'hui des actions non-violentes du type manifestation, occupation, ou piquets de grève.
Pourquoi ne pas faire de la politique dans des mouvements légaux ?
Le fait de s'organiser en dehors des structures légales est une question de cohérence révolutionnaire : c'est l'idée que la révolution ne peut se faire à l'intérieur d'un cadre légal. Si un révolutionnaire authentique était élu Président de la république, en admettant qu'il veuille sincèrement mettre fin au système capitaliste, je pense qu'il serait renversé par un coup d'Etat militaire.
Etes-vous hostiles à la démocratie parlementaire ?
Les lois ne sont pas faites pour défendre l'intérêt général. Elles sont faites pour défendre les intérêts de la bourgeoisie. Comme ces lois ne peuvent être changées par un processus légal, on ne peut les changer que par un rapport de forces. Or, ce rapport de forces est nécessairement illégal. Il n'existe pas dans l'histoire d'exemple de révolution qui se soit faite en respectant un processus légal. Pour ces raisons, le mouvement autonome est contre la démocratie représentative car il la considère comme une dictature. De mon point de vue, la seule véritable démocratie c'est celle que pratique le mouvement social : c'est la démocratie directe des assemblées générales.
Historiquement, le mouvement autonome est l'expression de cette démocratie directe née en Italie dans les assemblées ouvrières. Pour ma part, c'est cet engagement pour la démocratie directe qui fonde ma participation au mouvement autonome, dans une perspective autogestionnaire à la fois communiste et libertaire.
Vous avez rédigé une thèse sur le mouvement autonome en France de 1976 à 1984. Le mouvement autonome actuel a-t-il des similitudes avec celui des années 1970 ?
D'une certaine manière, à travers le mouvement des squats et le mouvement étudiant, le mouvement autonome d'aujourd'hui est à mon avis assez similaire à celui des années 70. Cependant, il faut reconnaître que depuis les années 90 les autonomes ont abandonné le recours à la violence militaire. Les hold-up, les attentats à l'explosif, la violence systématique, tout ça c'est terminé ! C'est une question de génération. Entre-temps, la société française a été largement pacifiée. En particulier, on a aboli la peine de mort et le service militaire. Le contexte international a également profondément changé. Les années 70 c'était encore la guerre froide, l'époque de la RDA. La Grèce, l'Espagne, et le Portugal étaient encore des Etats fascistes. L'un des premiers groupes autonomes, le MIL (Mouvement Ibérique de Libération), avait d'ailleurs été fondé par Jean-Marc Rouillan pour lutter contre le régime de Franco en Espagne. Donc le contexte a profondément changé.
Le mouvement a-t-il jamais cessé d'exister ? Pourquoi refait-il parler de lui aujourd'hui ?
Le mouvement autonome n'a jamais disparu même s'il a eu tendance à s'effondrer dans les périodes de repli du mouvement social, lorsque la gauche était au pouvoir. Depuis cinq ans, il y a donc une résurgence du mouvement autonome qui correspond au retour de la droite au gouvernement et à la reprise de l'agitation sociale. Mais si on en reparle aujourd'hui, c'est surtout parce que le ministère de l'Intérieur a décidé d'en faire une campagne médiatique pour se faire valoir.
» L'ADN au coeur de l'enquête
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2008/11/13/01016-20081113ARTFIG00521-sabotage-sans-coupables-la-police-en-fabrique-.php
Propos recueillis par Aziz Zemouri (Figaro Magazine)
13/11/2008
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INTERVIEW - Sébastien Schifres est doctorant en science politique et militant du mouvement des «autonomes», classé à l'ultra-gauche, auquel sont soupçonnées d'appartenir les dix personnes gardées à vue en lien avec les sabotages de caténaires à la SNCF. Il dénonce des arrestations sans «aucun élément matériel».
Connaissez-vous certains des interpellés ?
Pour le moment, la seule personne dont l'identité a été rendu publique c'est Julien Coupat (ancien de l'École des hautes études en sciences sociales et fondateur de la revue Tiqqun, ndlr). C'est un ami à moi qui a souvent été à mes côtés dans le mouvement étudiant. Je suis scandalisé des accusations que la police ose porter contre lui. Aujourd'hui, un intellectuel est en garde à vue pour ses idées. Il n'y a aucun élément matériel pour appuyer la thèse de la police. Et évidemment, quand la police ne trouve pas de coupables, elle les fabrique. En Julien Coupat elle a donc trouvé un faux coupable sous prétexte qu'il a écrit dans une revue révolutionnaire. Michèle Alliot-Marie prétend défendre la démocratie, mais le capitalisme n'a jamais été un régime démocratique.
Vous faites partie du mouvement des «autonomes», qu'est-ce que c'est ?
Il y a aujourd'hui en France des gens qui pensent que Mai 68 ce n'est pas fini et que ce n'est pas en votant pour Olivier Besancenot que l'on fera la révolution. Le mouvement autonome est une tendance du mouvement libertaire qui est apparu en France à la fin des années 70. A la différence des anarcho-syndicalistes qui considèrent que la lutte contre le capitalisme doit s'organiser dans les syndicats, les autonomes préfèrent s'organiser dans des collectifs informels, sans existence légale.
Vous avez vous-même participé à des actions, notamment l'occupation de l'EHESS en 2006. La violence est-elle inhérente au mouvement?
Les autonomes ne sont pas nécessairement violents. Généralement, la violence vient plutôt de la police comme on l'a vu à Gênes avec la mort de Carlo Giuliani, ce manifestant tué par balle par la police italienne. La plupart des actions des autonomes sont aujourd'hui des actions non-violentes du type manifestation, occupation, ou piquets de grève.
Pourquoi ne pas faire de la politique dans des mouvements légaux ?
Le fait de s'organiser en dehors des structures légales est une question de cohérence révolutionnaire : c'est l'idée que la révolution ne peut se faire à l'intérieur d'un cadre légal. Si un révolutionnaire authentique était élu Président de la république, en admettant qu'il veuille sincèrement mettre fin au système capitaliste, je pense qu'il serait renversé par un coup d'Etat militaire.
Etes-vous hostiles à la démocratie parlementaire ?
Les lois ne sont pas faites pour défendre l'intérêt général. Elles sont faites pour défendre les intérêts de la bourgeoisie. Comme ces lois ne peuvent être changées par un processus légal, on ne peut les changer que par un rapport de forces. Or, ce rapport de forces est nécessairement illégal. Il n'existe pas dans l'histoire d'exemple de révolution qui se soit faite en respectant un processus légal. Pour ces raisons, le mouvement autonome est contre la démocratie représentative car il la considère comme une dictature. De mon point de vue, la seule véritable démocratie c'est celle que pratique le mouvement social : c'est la démocratie directe des assemblées générales.
Historiquement, le mouvement autonome est l'expression de cette démocratie directe née en Italie dans les assemblées ouvrières. Pour ma part, c'est cet engagement pour la démocratie directe qui fonde ma participation au mouvement autonome, dans une perspective autogestionnaire à la fois communiste et libertaire.
Vous avez rédigé une thèse sur le mouvement autonome en France de 1976 à 1984. Le mouvement autonome actuel a-t-il des similitudes avec celui des années 1970 ?
D'une certaine manière, à travers le mouvement des squats et le mouvement étudiant, le mouvement autonome d'aujourd'hui est à mon avis assez similaire à celui des années 70. Cependant, il faut reconnaître que depuis les années 90 les autonomes ont abandonné le recours à la violence militaire. Les hold-up, les attentats à l'explosif, la violence systématique, tout ça c'est terminé ! C'est une question de génération. Entre-temps, la société française a été largement pacifiée. En particulier, on a aboli la peine de mort et le service militaire. Le contexte international a également profondément changé. Les années 70 c'était encore la guerre froide, l'époque de la RDA. La Grèce, l'Espagne, et le Portugal étaient encore des Etats fascistes. L'un des premiers groupes autonomes, le MIL (Mouvement Ibérique de Libération), avait d'ailleurs été fondé par Jean-Marc Rouillan pour lutter contre le régime de Franco en Espagne. Donc le contexte a profondément changé.
Le mouvement a-t-il jamais cessé d'exister ? Pourquoi refait-il parler de lui aujourd'hui ?
Le mouvement autonome n'a jamais disparu même s'il a eu tendance à s'effondrer dans les périodes de repli du mouvement social, lorsque la gauche était au pouvoir. Depuis cinq ans, il y a donc une résurgence du mouvement autonome qui correspond au retour de la droite au gouvernement et à la reprise de l'agitation sociale. Mais si on en reparle aujourd'hui, c'est surtout parce que le ministère de l'Intérieur a décidé d'en faire une campagne médiatique pour se faire valoir.
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http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2008/11/13/01016-20081113ARTFIG00521-sabotage-sans-coupables-la-police-en-fabrique-.php
avec-amour-et-paix- Journalistes
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Humeur : belle
tendances politiques : anarchiste
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Re: Sabotage : «Sans coupables, la police en fabrique»
On a retrouvé les écrits du gardé à vue pour sabotages à la SNCF
http://www.rue89.com/2008/11/13/on-a-retrouve-les-ecrits-du-garde-a-vue-pour-sabotages-a-la-sncf
http://www.rue89.com/2008/11/13/on-a-retrouve-les-ecrits-du-garde-a-vue-pour-sabotages-a-la-sncf
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