La Loi de la Civilisation graduelle
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La Loi de la Civilisation graduelle
À partir du XIXe siècle, l'expansion coloniale qui s'étend à l'extérieur des territoires seigneuriaux, la demande en richesses naturelles comme les produits de la forêt est en forte augmentation. En quelques années seulement, l'industrie forestière devient le centre névralgique du développement économique du Québec. Dès 1820, de partenaires militaires et économiques, les Amérindiens deviennent un problème de société qu'il faut régler au plus tôt. L'assimilation à la civilisation coloniale devient l'outil préconisé par les Britanniques. La sédentarisation des Autochtones doit être favorisée à tout prix. Des terres réservées à l'usage des Amérindiens, prises à même des territoires leur appartenant, sont délimitées. Au milieu du XIXe siècle, Kitigan Zibi[17], Pessamit[18] et Mashteuiatsh[19] deviennent alors les premières réserves modernes du Québec. Le 30 août 1851, le gouverneur de l'Union loue des terres au Québec et décide d'y placer ces sauvages que l'on veut sédentariser, contrôler, alors que depuis quelque temps, devant l'invasion constante de leurs territoires, la violation de leurs droits ancestraux, leur mécontentement ne cesse de grandir. En constituant ces réserves, on espère se ménager un accès plus facile aux ressources minières. De plus, il fallait définir un statut juridique pour ces Indiens. En 1850, on établissait donc le terme Indien de façon assez souple et inclusive. Toutefois, dès l'année suivante, le Parlement modifia les critères pour les rendre beaucoup plus restrictif. Il fallait que la loi respecte mieux les valeurs civilisatrices des conquérants. À partir de 1851, un non-Indien mariant une Amérindienne et les descendants d'une Indienne mariée à un Blanc devenaient exclus du statut d'Indien. Quelques années plus tard, en 1857, fut adoptée une loi visant ouvertement l'assimilation des Premières nations. Au coeur de cette loi se trouvait le concept d'émancipation. En renonçant à son patrimoine, un membre d'une Première nation de sexe masculin répondant à certaines conditions pouvait devenir un citoyen à part entière. Un Amérindien âgé de 21 ans, parlant français ou anglais, ayant reçu une éducation élémentaire, réputé de bonne moralité et sans dettes, pouvait être déclaré émancipé ou cessé d'être considéré comme un Indien. Ce faisant, il devenait un citoyen au même titre que les autres. Pour favoriser cette pratique, on accordait aux Indiens émancipés un titre de propriété absolu sur une terre de 20 hectares dans une réserve, plus leur part d'annuités versés auparavant à la bande. Dans la réalité, l'obtention de ce titre de propriété par un Indien émancipé permettait l'éclatement des communautés par l'intérieur. Non seulement les collectivités perdraient des membres les uns après les autres, mais elles perdraient des espaces territoriaux sur des terres réservées déjà extrêmement exigues. Les gouvernements tribaux venaient de perdre le contrôle exclusif sur les terres des réserves. L'Acte pour encourager la Civilisation graduelle constituait également une autre étape vers le contrôle gouvernemental des décisions relatives au statut d'Indien. Bien que le processus ait été amorcé en 1850 avec l'adoption d'une loi sur les terres du Bas-Canada, qui définissait le terme indien aux fins d'un droit de résidence dans les réserves, la nouvelle loi lançait le mécanisme d'émancipation qui allait retirer à d'autres personnes d'ascendance et de culture indienne, leur statut et leur appartenance à la bande. De plus, l'Acte pour encourager la Civilisation graduelle a maintenu et renforcé le sexisme exprimé dans la définition d'Indien, puisque l'émancipation d'un homme entraînait automatiquement celle de son épouse et de ses enfants. Enfin, le ton et les buts de cet acte, en particulier les dispositions sur l'émancipation qui affirmait la supériorité de la culture et des valeurs coloniales, annonçaient également le début d'un processus de dépréciation et d'érosion de l'identité culturelle indienne. Il s'agissait donc, du commencement d'une lutte psychologique contre l'identité indienne qu'allaient venir renforcer les interdictions contenues dans la Loi sur les Indiens qui se dessinait à l'horizon.
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