Faut-il taxer les bénéfices de Total ?

Pour faire baisser les prix à la pompe, faut-il imposer aux pétroliers de rogner sur leurs marges et leurs bénéfices ? Alors que le brut a franchi un nouveau record vendredi, le débat s'amplifie.

«TOTAL, ce n'est pas possible qu'ils se goinfrent et qu'ils gagnent à ce point de l'argent sur une crise terrible » et qu'on « ne les taxe pas plus ». Il faut donc « les forcer un peu » à redistribuer leurs bénéfices... Hier soir, invité sur Grand Jury RTL « le Figaro » - LCI, Bertrand Delanoë n'y est pas allé par quatre chemins.

La veille, Ségolène Royal avait donné la première salve, en exhortant l'Etat à « prélever les profits de Total » qui sont, a-t-elle dit, « un bien collectif ». Même le secrétaire d'Etat aux Transports, Dominique Bussereau, a appelé Total, déjà invité à financer la hausse de la prime à cuve, à plus de « solidarité ».

La polémique sur les superbénéfices du groupe pétrolier - 12,2 milliards d'euros en 2007 ! - resurgit au lendemain d'un nouvel accès de fièvre du brut. Vendredi, il a dépassé en séance les 139 $. Soit un bond de 40 % depuis janvier, résultat d'une spéculation effrénée. Du coup, des experts voient le baril pulvériser le plafond des 150 $ d'ici à juillet. Hier, les pays du G 8 se sont dits « inquiets » de cette course folle, le ministre japonais de l'Energie agitant déjà la menace d'une récession mondiale.

Comment faire pour alléger la facture à la pompe des automobilistes ? Nicolas Sarkozy a suggéré il y a une dizaine de jours un plafonnement de la TVA sur l'essence, pour l'heure rejeté par les partenaires européens. La gauche, ainsi que certaines associations de consommateurs, lorgnent plutôt du côté du groupe privé, qui détient 20 % de la distribution du carburant en France, loin derrière les grandes surfaces (57 %).

Un bonus-malus fiscal pour les compagnies

« La moitié de la hausse du gazole est liée à une progression phénoménale des marges de raffinage », autrement dit des pétroliers, s'indigne le président de l'UFC-Que choisir, Alain Bazot. Total rétorque que les bénéfices permettent d'investir et donc de préparer l'avenir. « La vraie solution, explique Alain Bazot, consiste à isoler les appartements, à multiplier les transports en commun et à développer les énergies renouvelables, mais cela demande des milliards d'investissements. » Autre idée de l'UFC-Que Choisir : soumettre à l'échelle européenne les compagnies pétrolières à un bonus-malus fiscal avantageant les comportements citoyens et pénalisant celles qui se contentent d'engranger la manne pétrolière.